Tout d’abord, alors qu’une crise sanitaire sans précédent depuis des décennies ébranle la France, nous souhaitons au nom de nos deux syndicats professionnels, manifester la solidarité des Experts-Comptables et des Commissaires aux Comptes avec l’ensemble de la population française. Les épreuves qu’elle traverse et les situations auxquelles elle fait face collectivement sont d’une gravité et d’une ampleur rare.
Bien entendu, puisque c’est le cœur de notre activité et de notre engagement, notre préoccupation première est le soutien de l’économie des entreprises, notamment les petites et moyennes entreprises, principales clientes de nos cabinets. Dès le discours du Président de la République du 12 mars, notre profession s’est fortement mobilisée pour leur apporter conseils, expertises et dispositifs d’accompagnement adaptés à la situation. L’ensemble des personnels de nos cabinets, tout en mettant en place le télétravail et un fonctionnement de crise, a continué à travailler au quotidien, à répondre aux nombreuses questions et interrogations de nos clients, notamment concernant le chômage partiel.
« Tout sera mis en œuvre pour protéger nos salariés et pour protéger nos entreprises quoi qu’il en coûte », comme l’a affirmé avec détermination Emmanuel Macron. Dans ce contexte, la priorité absolue était donnée à la préservation de la santé de la population et au ralentissement au maximum de la propagation du coronavirus afin d’éviter l’explosion des capacités du système de soins. Le leitmotiv « Restez chez vous pour sauver des vies » s’est imposé et parallèlement les restrictions de déplacement, de sorties, de regroupements ont été mises en place rapidement. Dans ce contexte, certaines entreprises ont été contraintes administrativement d’arrêter très rapidement leurs activités et de fermer. D’autres ont été en capacité de maintenir leurs activités par le déploiement du télétravail. Enfin, pour toutes les autres, les dirigeants ont mis en œuvre avant tout le principe de précaution pour protéger leurs salariés en l’absence des moyens sanitaires suffisants et face à un ralentissement très fort de l’activité, ont fermé leurs entreprises.
Après les envolées lyriques du discours présidentiel, la chute a été rude et le retour à la réalité violent sur le terrain : ordres, contre-ordres, communiqués des ministères du Travail et de l’Intérieur en contradiction avec la parole présidentiel se sont multiplié. L’absence d’anticipation des gouvernants face à cette crise, l’impréparation, la gestion chaotique au jour le jour ont été majeures. Quand une Ministre du Travail ose affirmer que des entreprises font preuve de manque civisme et profitent de la situation en refusant de poursuivre leur activité, nous touchons le fond de l’incompétence, de l’indécence et du manque criant de connaissance de la réalité concrète des TPE / PME et leurs dirigeants depuis le début de cette crise. Si nous sommes en guerre, comme l’a proclamé avec gravité Emmanuel Macron, c’est à l’Etat d’assumer ses responsabilités quant au maintien de l’activité économique du pays, en prenant de mesures fortes, claires et rapides : définitions des activités à maintenir « quoi qu’il en coûte », conditions de mises en œuvre, négociations avec les branches professionnelles concernées pour définir la reprise et sécuriser juridiquement à la fois les employeurs et les salariés en cas de contamination. Faire un discours de chef de guerre ne suffit pas, encore faut-il être à la hauteur dans l’action et la conduite de la guerre.
Rien de cela n’a été fait. Les injonctions paradoxales et contradictoires ont été au contraire multiples ; Certes, des mesures d’urgence ont été annoncées : report du paiement des charges sociales et des impôts directs du mois de mars notamment. Toutefois, les flottements et incertitudes actuels sur l’indemnisation du chômage partiel ne peuvent perdurer plus longtemps. Face à l’arrêt de l’activité économique dans de nombreux secteurs, les trésoreries des entreprises sont très fragilisées alors qu’elles vont devoir assurer dans une semaine le paiement intégral des salaires de mars, sans visibilité, ni précisions. Le seul point où le gouvernement a été clair et constant est que les entreprises doivent payer la TVA de mars, alors même que de nombreuses entreprises sont déjà dans l’impossibilité de l’honorer faute d’une trésorerie suffisante ! Entre payer la TVA et payer les salaires, beaucoup d’entrepreneurs ont déjà choisi.
En conséquence, nous appelons solennellement les Ministres de l’Economie et des Finances, de l’Action et des Comptes Publics et du Travail d’être enfin à l’écoute des dirigeants des TPE/PME, de leurs Experts-Comptables et Commissaires aux Comptes, afin de prendre les mesures qui s’imposent pour préserver la continuité d’exploitation et les emplois.
Soyez assurés du soutien, de l’engagement, de l’investissement indéfectible de toute la profession comptable pour assumer son rôle auprès des entreprises. Dans cette situation de guerre, nous sommes au quotidien sur le front pour maintenir l’activité économique des entreprises et la préservation des emplois de leurs salariés.
Philippe Masson – Président IFEC Rhône-Alpes
Jacques Maureau – Président ECF Rhône-Alpes