Alors que le discounter lyonnais d’électroménager MDA vient d’être placé en procédure de sauvegarde (lire ici), son dirigeant Michel Vieira avance un « acte de gestion » et assure de la solidité financière du groupe. Il dénonce également la gestion du gouvernement qui autorise la vente d’électroménager dans les grandes surfaces, alors que l’ensemble de ses points de vente sont fermés.

Pourquoi avez-vous demandé le placement en sauvegarde du groupe MDA ?
Michel Vieira : La situation incroyable que nous vivons depuis plusieurs semaines maintenant avec la fermeture de l’ensemble de nos boutiques va impacter la situation économique et financière de nos entreprises, même si nous avons mis en œuvre des actions pour réduire au maximum nos charges selon les directives gouvernementales. La demande du placement en sauvegarde est un acte de gestion et d’anticipation, avec l’objectif de pouvoir reprendre l’activité dès que possible sereinement et dans les meilleurs conditions. En tant que dirigeant d’une entreprise de plus de 1000 collaborateurs, j’ai un devoir d’anticipation.
Le jugement du tribunal de commerce évoque, dans son jugement, une « fragilité du groupe » avant même la crise sanitaire. Quelle est l’origine de ces difficultés ?
Tout d’abord, je tiens à être clair : MDA Company ne rencontre pas de problème financier. La boîte est solide, et le bilan 2019 était plutôt bon avec beaucoup de trésorerie en réserve. La preuve, c’est qu’avant le confinement, nous étions en train de réaliser une acquisition… Le placement en sauvegarde anticipe ce qui aurait pu se produire dans le futur. Il faut bien se rendre compte que notre activité s’est arrêtée du jour au lendemain, et nous ne savons toujours pas comment va être géré le déconfinement : Quand ? Comment ? Où ? Avec quelles restrictions ? Etc…
MDA est la première grande entreprise française à se tourner vers le tribunal depuis le début de la crise du Covid-19. Pourquoi prendre cette décision aussi rapidement ?
Je le répète, il s’agit d’un acte de gestion pour faire face à cette situation exceptionnelle. J’ai pris cette décision car plusieurs clients professionnels m’ont prévenu qu’ils n’allaient pas pouvoir payer leurs échéances. Cette procédure me permet de garder le contrôle de l’entreprise, de ne pas licencier de collaborateurs et de ne « planter » personne grâce à un échelonnement des dettes. Et j’ai jugé plus opportun de faire une demande de placement en sauvegarde plutôt qu’un prêt garanti par l’État (dispositif de 300 milliards d’euros pour soutenir les entreprises impactées par la crise, Ndlr).
Pourquoi ?
Les milliards d’euros de financement débloqués par l’État ne font que déplacer le problème de 18 ou 24 mois, car les entreprises ne pourront pas rembourser ces prêts. Car ce ne sont pas des cadeaux faits aux entreprises, il faudra rembourser après…
Comment jugez-vous l’action du gouvernement pendant cette crise du Covid-19 ?
Ce qui m’embête le plus, c’est que l’État a créé une situation de concurrence déloyale inadmissible avec les grandes surfaces. J’ai alerté Bercy à ce sujet, mais je n’ai pas eu de réponse. Alors qu’un groupe comme MDA n’a pas le droit d’ouvrir ses magasins -même en drive- car l’électroménager n’est pas considéré comme des produits de première nécessité, les grandes surfaces sont, elles, autorisées à vendre ces produits. A Andorre par exemple, les rayons qui ne sont pas de première nécessité – comme l’électroménager ou l’habillement – ne sont pas accessibles aux clients. Alors qu’en France, les clients s’équipent en grande surface si leur frigo ou leur machine-à-laver tombe en panne. Ce qui veut dire que l’on ne récupérera pas ce chiffre d’affaires à la réouverture des magasins. A la reprise, l’activité sera en berne et nous nous préparons à une guerre des prix hallucinante qui aura un impact sur nos marges commerciales…