Huit ans après avoir sauvé Kem One, Alain de Krassny s’apprête à passer le relais à un nouvel actionnaire chez Kem One. Et pas n’importe qui, en l’occurrence, puisqu’il s’agit du fonds américain Apollo qui détient tout simplement 472 milliards de dollars d’actifs sous gestion. Basé à New York, Apollo n’est pas inconnu à Lyon puisqu’il détenait le terrain du site du Puisoz à Vénissieux en 2006 sur lequel l’OL lorgnait pour son Grand Stade. L’affaire avait tourné court, compte tenu du prix exigé par Apollo qui proposait de surcroit une opération foncière à 50–50 à l’OL. D’où l’abandon du projet parti à Décines où Jean-Michel Aulas put acquérir le foncier pour une bouchée de pain.
Le dossier Kem One représente un bel exemple de redressement industriel spectaculaire pour une entreprise contrainte au dépôt de bilan début 2013, après une cession mal maîtrisée l’année précédente par Arkema à l’homme d’affaires américain Gary Klesch. Pour sauver le 2e producteur européen de PVC, ses 1 400 salariés (sept sites en France dont Lyon où se trouve son siège social, Saint-Fons et Balan dans l’Ain), la mobilisation générale est totale. Du préfet, Jean-François Carenco, et de l’administrateur judiciaire, M°Bruno Sapin, aux syndicats, en passant par le directeur général et, surtout, le repreneur Alain de Krassny, l’union sacrée permet à Kem One de se redresser à la vitesse grand V.
Un fonds qui connaît l’industrie et la chimie
Quand le tribunal de commerce de Lyon remet les clés de la maison à Alain de Krassny, ce dernier dispose d’une belle expérience de redressement d’entreprises en Autriche. Sa feuille de route est millimétrée. Elle recense une centaine d’actions à engager : entre autres, des investissements massifs à hauteur de 500 millions € pour abaisser les coûts de production et prendre en compte les enjeux environnementaux. Gros consommateur d’énergie, Kem One a, par exemple, réduit de moitié sa consommation de vapeur sur le site de Lavéra en 5 ans (de 1,2 million de tonnes à 600 000 tonnes). L’engagement financier de l’Etat, à hauteur d’une centaine de millions €, l’allègement de la dette négociée par Bruno Sapin et le redémarrage grâce aux investissements, permettent à Kem One de revenir à l’équilibre dès 2015, puis d’être positif en 2017, de 50 millions €. Tant et si bien que Kem One rembourse toutes ses dettes en 2018 avec six ans d’avance. Et traverse la crise sanitaire en 2020 plus que correctement.
Le projet de cession de Kem One aux Fonds Apollo, pour lequel les deux acteurs ont signé vendredi une option de vente devrait être finalisé d’ici à la fin de l’année. Alain de Krassny, qui soufflera ses 79 bougies très bientôt, et n’avait pas trouvé, au sein de sa famille, de repreneur intéressé, cherchait un acquéreur connaissant bien le monde de l’industrie (plus particulièrement de la chimie) avec la volonté de poursuivre les investissements engagés. Deux conditions remplies par Apollo. « Je suis très fier de ce que nous avons accompli depuis fin 2013, déclare Alain de Krassny. Aujourd’hui, Kem One a des fondations solides. Je suis convaincu que les ambitions d’Apollo permettront d’accélérer le développement de Kem One ». De son côté, Samuel Feinstein, associé chez Apollo, précise : « nous avons une longue expérience de l’industrie et nous serions ravis de mettre à profit notre expertise et notre capital pour soutenir l’équipe talentueuse de Kem One dans cette nouvelle phase de croissance ».
Le management actuel conforté
Après approbation de la cession par les autorités de la concurrence et réglementaires et après le processus d’information/consultation des instances représentatives du personnel, le management actuel de Kem One devrait poursuivre sa mission. « Je suis très fier d’avoir porté le projet Kem One aux côtés d’Alain de Krassny et des résultats que nous avons atteints, ajoute Frédéric Chalmin, directeur général de Kem One. Cette réussite nous permet d’envisager aujourd’hui une nouvelle phase de développement grâce à la puissance financière d’Apollo et j’aborde cette nouvelle étape avec enthousiasme ».
Le chiffre d’affaires de Kem One qui avait baissé à 800 millions € en 2020, devrait atteindre le milliard € en 2021, en forte croissance.