Bien­nale de Lyon : la spec­ta­cu­laire démis­sion de François Bordry

Le président de la Biennale de Lyon démissionne avec perte et fracas de ses fonctions. Et met violemment en cause la Métropole de Lyon pour son absence de concertation, notamment sur l’abandon du site Fagor. La Métropole parle de « démission qui n’en est pas une ». François Bordry devait quitter ses fonctions mardi dernier…

Le départ préci­pité de Domi­nique Hervieu était un signe avant-coureur du malaise qui secoue la Bien­nale de Lyon. Si la direc­trice artis­tique de la Bien­nale de la danse a justi­fié son départ par le fait qu’un projet comme les JO de Paris 2024 ne se refuse pas, il est clair que les événe­ments de ces derniers mois ont dû peser aussi dans sa déci­sion. Cette fois-ci, avec la démis­sion de François Bordry, homme d’ex­pé­rience, posé et respecté, ancien patron régio­nal de VNF et l’un des pères de la Confluence, le doute n’est plus permis. Il y a bel et bien des étatd d’âme du côté de la Bien­nale de Lyon.

Le président de la Bien­nale de Lyon n’y va pas avec le dos de la cuillère et met en cause ouver­te­ment la Métro­pole de Lyon. Et de consta­ter que « la Métro­pole de Lyon conduit une poli­tique marquée par une absence totale de concer­ta­tion avec les asso­cia­tions et les insti­tu­tions char­gées de mettre en œuvre l’ac­tion cultu­relle : c’est par la presse, par exemple, que la Bien­nale a appris qu’elle serait délo­gée dès 2023 des usines Fagor, les festi­vals cultu­rels devant lais­ser la place à… l’en­tre­tien des tram­ways de l’ag­glo­mé­ra­tion… ». Et de pour­suivre : « Natu­rel­le­ment, aucune solu­tion de rechange pour la Bien­nale de la Danse et la Bien­nale d’art contem­po­rain n’a évidem­ment été prépa­rée, comme si un tel démé­na­ge­ment dans une friche indus­trielle (qui néces­site toujours des travaux impor­tants pour que l’on puisse y accueillir du public) pouvait être réalisé en quelques mois… »

« Prio­rité au circuit court ! »

Voilà pour l’en­trée en quelque sorte. Arrive le plat de résis­tance : « Mieux  encore, la Métro­pole a comman­dité un audit de toutes les insti­tu­tions cultu­relles l’ayant comme tutelle prin­ci­pale, pratiquant l’in­tru­sion dans leur fonc­tion­ne­ment même, avec pour objec­tif essen­tiel (qui ne sera sûre­ment jamais avoué), de deman­der à ces struc­tures de mettre moins l’ac­cent sur la créa­tion artis­tique et sur le rayon­ne­ment au-delà des strictes limites du terri­toire, au profit d’une action se concen­trant essen­tiel­le­ment sur l’ani­ma­tion cultu­relle locale et, sans doute, la mise en valeur des seules pratiques d’ama­teurs… Ainsi la Bien­nale, qui jusqu’à main­te­nant porte l’image de Lyon bien au-delà des fron­tières régio­nales et mêmes natio­nales (en offrant au public de la Métro­pole et de la Région un grand nombre de créa­tions mondiales dans le domaine de la danse et, en art contem­po­rain, ce qu’il y a de meilleur dans la créa­tion d’aujourd’­hui) sera priée, si les autres tutelles laissent faire, de limi­ter ses ambi­tions à l’ani­ma­tion locale. En ce domaine aussi, prio­rité au circuit court ! »

Le dessert n’a rien de sucré, mais plutôt très acide : « Les élus se réveille­ront sans doute, mais il sera trop tard, le jour où ils s’aper­ce­vront que la capi­tale, toujours à l’af­fût d’une faiblesse en province, pourra rapa­trier à Paris, enfin, la « grande Bien­nale française ». De là à penser qu’a­près la direc­tion de la culture pour Paris 2024, Domi­nique Hervieu pour­rait être solli­ci­tée pour un grand rendez-vous de la danse à Paris, il n’y a qu’un pas que redoute François Bordry.

« une gros­sierté sans nom »

Cédric Van Styven­dael, vice-président chargé de la culture à la Métro­pole de Lyon réagit, à son tour avec viru­lence à ce dernier propos, quant à un hypo­thé­tique rapa­trie­ment de la Bien­nale à Paris : « C’est d’une gros­siè­reté sans nom et pas correct vis-à-vis de toutes les équipes de la Bien­nale. Mardi, tous les parte­naires ont renou­velé leurs enga­ge­ments, les collec­ti­vi­tés locales aussi. Il n’y a aucune défiance, ni remise en cause ». Quant à la démis­sion en tant que telle de François Bordry, le maire de Villeur­banne estime qu’il s’agit « d’une démis­sion qui n’en est pas une. C’est une mise en scène. François Bordry remet­tait son mandat de président mardi à l’oc­ca­sion d’un conseil d’ad­mi­nis­tra­tion. Il se trouve que la personne pres­sen­tie pour lui succé­der a souhaité attendre que le succes­seur de Domi­nique Hervieu soit choisi pour prendre ses fonc­tions en même temps. J’ai demandé à François Bordry de rester quelques semaines de plus. Il m’a dit qu’il réser­vait sa réponse. J’en prends connais­sance par un commu­niqué de presse. Je suis surpris et un peu peiné ».

Sur la ques­tion du démé­na­ge­ment du site Fagor, Cédric Van Styven­dael explique que « la Métro­pole a accédé à la demande de repous­ser le démé­na­ge­ment jusqu’à fin 2023. Nous avons 24 mois devant nous et déjà des propo­si­tions sont sur la table. Et nous discu­tons très serei­ne­ment de la suite ».

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