« Jamais, je n’aurais imaginé être un jour préfète de Région », avoue Fabienne Buccio lors de sa prise de contact avec la presse. Pur produit de la méritocratie républicaine, la nouvelle préfète du Rhône et de la région Auvergne-Rhône-Alpes, née de parents modestes dans la région de Gap, étudiante boursière, a gravi les échelons de la fonction publique, sans passer par l’ENA. « Je suis une laborieuse », déclare celle qui a succédé à 63 ans, fin janvier, à Pascal Mailhos. « Ce qui m’anime, c’est l’intérêt général et la volonté de se rendre utile ». Repérée par Jacques Chirac en Corrèze (pendant la tempête de 1999), elle travaillera à ses côtés à l’Elysée entre 2002 et 2007. Successivement préfète en Mayenne, dans l’Eure et la Loire, elle accepte le Pas-de-Calais en 2015, quand d’autres (hommes ?) préfèrent renoncer à ce poste. Elle prend à bras le corps le dossier de « la lande » à Calais qu’elle a toujours refusé d’appeler « la jungle » parce que « l’aspect humain est très fort ». Elle se dit alors qu’elle n’aura plus de dossier aussi marquant à gérer à l’avenir…
3e préfecture de région
Préfète de région en Normandie puis en Nouvelle Aquitaine en 2019, elle se retrouve à nouveau en 1ère ligne lors des incendies en Gironde, l’été dernier. « En 20 ans, je n’ai pas connu une telle expérience. Nous avons dû déplacer 50 000 personnes », précise-t-elle. Avec sa nomination à Lyon, sa « 3e préfecture de région » et la 1ère d’une femme dans le Rhône, elle sait que sa « mission ne sera pas un long fleuve tranquille ». Et, si elle a dû intervenir aussitôt arrivée sur un épineux dossier concernant le maire de Lyon, Grégory Doucet, elle prend soin de préciser que « la préfète et l’Etat ne sont l’ennemi de personne ». Dans l’affaire de l’annulation de la conférence sur les accords d’Oslo et de la venue de l’avocat paslestinien Salah Hamouri, si elle s’est montrée pressante auprès du maire de Lyon, c’est parce qu’elle considérait qu’il y avait bien « un trouble à l’ordre publique ». Les délais étant très courts pour agir en droit, elle a donc précisé au maire de Lyon que, s’il ne prenait pas la décision, elle la prendrait. « Il a pris la bonne décision. C’est bien », se contente-t-elle d’ajouter.
Sur ses relations avec les élus des principales collectivités locales, elle ajoute : « les collectivités locales peuvent agir seules, l’Etat peut agir seul, mais ensemble, on fait beaucoup mieux. Il faut savoir s’accorder et se respecter ». Les dossiers ne manquent pas. Elle entend bien les aborder tous : sécurité publique, vidéosurveillance, hébergement d’urgence, mais aussi implantation des futurs EPR ou bien encore liaison à grande vitesse Lyon Turin…
Se dépêcher d’avancer sur le Lyon-Turin
Autant de sujets qui fâchent avec les exécutifs écologistes de la Ville de Lyon et de la Métropole de Lyon ? « En matière d’énergie, il faut être raisonnable. C’est important de sécuriser nos approvisionnements et de pouvoir compter sur la filière nucléaire. Et, en la matière, c’est le gouvernement qui décide », indique Fabienne Buccio.
De la même manière, sur la liaison à grande vitesse Lyon Turin, la préfète rappelle qu’il faut « se dépêcher d’avancer » avec, là aussi, une responsabilité qui incombe à l’Etat. Alors que le chantier des voies d’accès progresse de façon soutenue côté italien, la France, n’a toujours pas tranché, sur ses propres voies d’accès au tunnel international. Après la remise du rapport du Conseil d’orientation des infrastructures, l’heure des choix entre les différents tracés de ces voies d’accès est venue. Un dossier qui va beaucoup occuper Fabienne Buccio.
Tout comme celui du Contrat de Plan Etat-Région (CPER) pour le volet concernant les métropoles de la région. « L’objectif est d’aboutir d’ici à la fin du 1er trimestre », explique Fabienne Buccio. Pour l’instant, le CPER signé entre l’Etat et la Région (4,4 milliards d’euros) concerne tout le territoire régional sauf les métropoles de la région. Elle espère arriver à un accord, mais l’hypothèse d’une absence de signature avec les métropoles ne peut être exclue.
Interrogée, enfin, sur son statut de femme, la nouvelle préfète répond dans un large sourire « je ne fais pas de complexe. Je suis ce que je suis ».