Vous avez effectué une partie de vos études à HEC Montréal. On sait que l’international est très présent et important dans l’ADN du groupe Mérieux, était-ce une raison de plus pour faire des études sur le continent nord-américain ?
Alexandre Mérieux : À l’époque, je ne me posais pas trop la question, mais aujourd’hui, c’est vrai, 45 % du chiffre d’affaires de bioMérieux est fait aux États-Unis. Cela continue d’être une région très, très porteuse pour nous. Mais à l’origine, ce n’était pas forcément calculé. C’est toujours important de bien connaître le continent nord-américain. bioMérieux a toujours cultivé sa dimension internationale tout en conservant des racines fortes en France, notamment en région Rhône-Alpes. Alors que nous réalisons 93 % de notre chiffre d’affaires hors de France, nous y conservons 30 % de nos effectifs mondiaux (près de 14 000 collaborateurs dans 45 pays).
Vous êtes présent dans le groupe depuis près de 25 ans, avec des débuts à Chicago chez Silliker renommée depuis Mérieux NutriSciences. Était-ce un symbole de commencer dans le groupe à l’international, un choix personnel aussi ?
Je ne sais pas si c’est vraiment un symbole. Cela s’est fait naturellement, c’était bien de démarrer là-bas. À l’époque, la société n’était pas dans le groupe depuis très longtemps et elle se développait…
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Vous rentrez à Paris en 2001 et continuez à travailler sur les aspects de contrôles microbiologiques industriels. Peut-on dire qu’il y a un vrai intérêt pour l’industrie chez vous…
Quand je rentre en France, je suis toujours chez Mérieux NutriSciences. C’était une société avec à la fois du service et une forte base industrielle. J’y suis resté jusqu’en 2005, date à laquelle j’ai rejoint l’unité de microbiologie industrielle de bioMérieux qui fait également du contrôle qualité pour les industries agroalimentaires et pharmaceutiques. Et, au-delà de l’industrie, je dirais que j’ai tout autant d’intérêt pour tout ce que fait le groupe en matière clinique. Mais c’est vrai qu’on se définit comme étant une société bio-industrielle. Nous misons énormément sur l’innovation. Cela fait partie de l’ADN de bioMérieux de concevoir et de produire. D’ailleurs, nous avons une forte empreinte industrielle, c’est là où on a le plus de collaborateurs.
Dans votre parcours, il y a aussi le lancement du fonds d’investissement Mérieux Développement en 2009. C’est votre idée. Vous estimiez indispensable que le groupe possède un véhicule financier pour accompagner les start-up dans votre domaine et les faire participer à votre écosystème ?
Pour les start-up et les ETI, on a deux véhicules : un qui soutient l’innovation « early stage », et un autre qui soutient les sociétés déjà rentables dans leur développement. Je n’étais pas tout seul lors du lancement en 2009, car justement l’idée c’était de se dire que le groupe avait déjà une histoire avec une expérience industrielle, R&D, et aussi à l’international, et qu’on pouvait accompagner des entrepreneurs et des sociétés dans le domaine de la santé, dans des secteurs complémentaires à ceux du diagnostic clinique ou de la sécurité alimentaire.
Puis on a structuré avec le temps cette société qui est devenue Mérieux Equity Partners avec des équipes à Lyon et à Paris et dont la taille du dernier fonds est d’environ 600 millions d’euros. Nous ne sommes pas seuls dans ce fonds, nous avons des partenaires qui investissent avec nous. Nous en sommes au quatrième fonds et, depuis l’origine, Mérieux Equity Partners représente 1,5 milliard d’euros d’actifs sous gestion.
« C’est bien d’être passé par les différents métiers de bioMérieux pour comprendre la société dans toutes ses dimensions »
Revenons à bioMérieux, dont vous êtes nommé directeur général en 2014 puis PDG depuis 2017. Avoir fait un parcours initiatique dans le groupe avant de rejoindre bioMérieux ici à Lyon, c’est un plus pour vous aujourd’hui, ces postes à l’international et à Paris ?
On passe notre temps à voyager donc on restera toujours à dimension très internationale chez bioMérieux. C’est plus l’évolution au sein de bioMérieux que je retiens. J’ai donc démarré en m’occupant de l’unité de microbiologie industrielle. Après, en 2011, j’ai pu rentrer dans le cœur un peu plus historique de l’entreprise en m’occupant de la microbiologie clinique, un peu du manufacturing aussi et, à partir de 2014, je suis devenu directeur général. Donc c’est bien d’être passé par les différents métiers de bioMérieux pour comprendre la société dans toutes ses dimensions. Mais je ne sais pas si l’on peut parler de parcours initiatique, je ne suis plus tout jeune non plus, ça fait un moment que je suis là. C’est bien d’avoir eu différentes fonctions au sein du groupe, même si j’ai été nommé directeur général assez tôt, à 41 ans.

L’acquisition fin 2013, début 2014 de BioFire aux États-Unis a été une étape importante pour bioMérieux. Vous êtes directement à la manœuvre avec le PDG d’alors, Jean-Luc Bélingard, sur cette acquisition qui est devenue aujourd’hui un actif stratégique majeur pour le groupe. Vous aviez bien mesuré tout l’apport que pouvait représenter BioFire ?
Oui, on a toujours été présents pour investir dans les maladies infectieuses. Mais il nous manquait une offre de biologie moléculaire qui était déjà, à l’époque, la technologie émergente la plus prometteuse dans notre secteur, parce que sensible et rapide. On a pu faire l’acquisition de la société BioFire qu’on connaissait déjà, puisqu’on collaborait avec elle dans le domaine des tests de contrôle alimentaire. Cette acquisition a été assez majeure parce qu’elle représentait à l’époque un gros ticket d’investissement pour nous, mais surtout ça a été un gros succès. Quand on a racheté la société, elle devait faire 50 millions de dollars de chiffre d’affaires, et aujourd’hui c’est plus d’un milliard. BioFire a beaucoup porté la croissance de bioMérieux ces dix dernières années.
Un des éléments forts des tests de BioFire, c’est la rapidité des résultats ?
Oui, la simplicité, la rapidité et l’exhaustivité, parce qu’on peut faire beaucoup de tests en même temps. Ils donnent des résultats assez rapides et on arrive à identifier s’il s’agit d’une bactérie, d’un virus, et on arrive à orienter le traitement. Et là, on vient de lancer une nouvelle plateforme nommée SpotFire il y a quelques mois qui est encore beaucoup plus rapide : des tests qui vont être faits en 15 et 20 minutes et qui vont nous permettre – notamment aux États-Unis – de pouvoir aller au plus proche du patient, de faire les tests à l’hôpital, chez le médecin ou autre. Donc c’est une nouvelle tendance, un nouveau besoin et cette nouvelle plateforme devrait nous permettre d’entrer sur ce nouveau marché.
Quand vous vous retournez sur cette histoire de 60 ans, quel regard portez-vous sur cette aventure entrepreneuriale ?
Spontanément, j’ai envie d’évoquer la soirée des 60 ans de bioMérieux en juin dernier. Une belle soirée. On a réuni tous nos collaborateurs de France, 4 600 personnes à la Halle Tony-Garnier. C’était un beau moment ensemble avec pas mal de ferveur. Une belle émotion, une fierté du chemin accompli, et c’était assez mobilisateur. Ce que je retiens de ces 60 ans d’histoire, c’est que c’est bien de durer.
Et puis, surtout, on s’aperçoit que l’entreprise continue à innover, qu’il y a encore un bel avenir devant nous et que les enjeux sur lesquels on est mobilisés depuis l’origine sont toujours très fortement présents. La science évolue, la technologie évolue, mais les virus et les bactéries évoluent aussi. Donc, il y a ce besoin de continuer à développer et à innover parce que le risque des maladies infectieuses va rester, voire réémerger. Le diagnostic va continuer de jouer un rôle important.
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bioMérieux, c’est aussi une entreprise qui a su conquérir son indépendance d’abord vis-à-vis de l’américain Becton Dickinson (qui a détenu la moitié du capital jusqu’en 1974, date du rachat majoritaire par Alain Mérieux) puis des financiers de CGIP avant l’introduction en Bourse en 2004. C’est aussi cela la marque de fabrique de Mérieux : être majoritaire ou se désengager ?
Nous aimons bien être chez nous. Pas pour des questions d’ego, mais pour des questions de long terme. Nous sommes très ouverts, aussi bien chez bioMérieux que chez Mérieux NutriSciences, sur le fait d’avoir des partenaires à nos côtés. bioMérieux est, en plus, coté en Bourse, mais c’est bien d’avoir cette indépendance. Cela permet de garder cette vision à long terme dont on a besoin dans nos métiers.
Si on revient sur le cœur de métier de bioMérieux, il y a cette intuition dès le départ de l’importance des tests de diagnostic dans les domaines clinique et alimentaire… On sait que 70 % des décisions des médecins reposent sur des tests préalables. C’est là que réside votre force ?
Ce qui fait notre force, c’est qu’on soit plutôt focalisé sur les maladies infectieuses, tout ce qui est virus, bactéries et parasites. On n’est pas, comme d’autres, dans les domaines de l’oncologie, du diabète… Après, nous avons des concurrents qui peuvent être plus gros que nous, mais le fait d’avoir développé cette expertise dans cette niche importante, ça nous différencie. Nos clients ou partenaires savent que nous sommes prêts à investir dans ce domaine, que ce soit en R&D ou en acquisitions. Et aujourd’hui, le gros sujet de santé publique après le Covid dont on sort, c’est tout ce qui concerne la résistance aux antibiotiques. On les a surutilisés, surconsommés, et peu de nouvelles molécules sont développées. Donc le diagnostic va être très important pour identifier, détecter la pathologie et le traitement adapté.
La crise Covid a été un moment important pour vous, il fallait être au rendez-vous. Peut-on dire que cela a été un moment de vérité pour l’entreprise ?
De vérité, je ne sais pas, mais de grande utilité, c’est certain. On avait, dès janvier 2020, commencé à travailler sur des tests Covid. Quand l’épidémie a vraiment éclaté, nous avons mobilisé toutes les fonctions dans l’entreprise – R&D, manufactoring et autres – pour développer les tests et surtout les produire. On a pu proposer une gamme assez large avec plusieurs types de tests. Donc oui, ça a été une période assez dense. Personne n’en garde un bon souvenir, mais c’était un moment d’importance pour le groupe, pendant lequel chacun a pu prendre conscience de son utilité. Le diagnostic PCR n’a plus de secret pour personne, donc c’est bien qu’on ait pu être pendant un moment, non pas en première ligne, ce sont les personnels soignants, mais en deuxième ligne. C’était un moment assez fort.
Avec une obligation de résultat, puisque si vous n’aviez pas trouvé de tests rapidement…
On savait qu’on allait les trouver, la question c’était plutôt la rapidité pour les développer et surtout les produire. On est une société bio-industrielle, donc ce qui marche au labo, il faut ensuite le faire fonctionner à grande échelle en capacité industrielle. Et c’est aussi cela qui a demandé pas mal d’efforts.
Venons-en aux projets et ambitions de bioMérieux avec, déjà, l’évolution de votre gouvernance qui se traduit par la nomination de Pierre Boulud au poste de directeur général. Et vous donc comme président exécutif. L’idée, c’est que vous vous concentriez désormais sur la stratégie avec une direction opérationnelle qui relève de Pierre Boulud ?
Oui, j’étais directeur général depuis 2014 et PDG depuis 2017, donc avec les deux rôles. Après neuf ans de direction opérationnelle, on a pensé que c’était le bon moment pour faire évoluer la gouvernance et de faire monter Pierre, qui fait un très bon travail depuis sept ans, en lui confiant la direction générale. De mon côté, je vais être toujours fortement impliqué dans bioMérieux, mais sur un axe plus stratégique. Je n’aurai plus l’animation du comité de direction ou autres, mais comme je suis là depuis longtemps, que c’est notre société qui porte notre nom, je veux quand même rester assez présent.
Cela bouge tellement dans notre secteur qu’il est indispensable d’avoir cette vision prospective, de voir les différentes sociétés qui émergent dans le secteur… La société a beaucoup grandi, il faut continuer à garder la dynamique, travailler le sentiment d’appartenance et répondre aux enjeux RSE qui sont de plus en plus importants. Un directeur ne peut pas tout faire. Donc on ne sera pas trop de deux pour la gouvernance de bioMérieux. Donc oui, ce sera un rôle différent pour moi : je serai toujours aussi actif d’un point de vue du temps passé au sein de bioMérieux, mais de manière différente. Et je trouve que ce n’est pas idiot de dissocier la gouvernance, pour avoir différents types d’étages et d’approches dans l’entreprise.
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Dans les aspects stratégiques, il y a ces investissements industriels (300 millions d’euros dans les sites français sur les prochaines années) et R&D (12 à 13 % de votre chiffre d’affaires) que vous avez annoncés…
Nous investissons de partout pour soutenir notre activité. On y croit, on a un gros pipeline R&D. Il faut préparer maintenant la production de demain. Mais c’est vrai que les sites français sont importants pour nous : ils sont historiques et nous avons continué d’investir à chaque fois dans notre outil industriel. Parfois, nous rénovons les sites : nous les améliorons du point de vue de la qualité de vie, c’est ce qu’on a fait sur plusieurs campus.
Mais c’est aussi beaucoup des projets d’automatisation, de capacité pour anticiper la croissance. Il y a aussi des sujets liés à la RSE, à la décarbonation. Il faut également investir à la fois pour des questions environnementales, mais aussi de productivité. Donc c’est vrai qu’entre le site de Marcy-l’Étoile avec nos activités de production des immunoessais, le site de Craponne pour nos activités de production de milieu de culture, Grenoble pour la R&D et la biologie moléculaire, La Balme en Isère pour de la R&D et de la production pour les gammes de microbiologie… il y a de quoi faire, et c’est bien. C’est plutôt sain.
Cela concernera aussi le site de la plaine de l’Ain ?
Nous réalisons un investissement important dans la plaine de l’Ain, où se trouve notre centre logistique. C’est de là que nous fournissons beaucoup de clients en Europe et à l’international. Là aussi, on sort d’une période de forts investissements. Nous allons inaugurer ces derniers développements cet automne. Il se passe beaucoup de choses. On a la chance d’être en croissance, donc cela s’accompagne d’investissements industriels.
Cela rentre aussi dans votre politique d’indépendance. Vous le rappeliez précédemment, la France ne représente que 7 % de votre chiffre d’affaires, mais 30 % des effectifs. Vous tenez à avoir la maîtrise de la production en France ?
Oui, on produit aussi beaucoup aux États-Unis, mais la France c’est important. Nous sommes une société internationale avec un centre de décision qui est et restera en France. Et c’est important d’avoir un écosystème dans le domaine de la santé qui soit fort autour de nous. Cela passe par de la R&D, par du manufacturing, par nos implications dans le biocluster lyonnais pour l’innovation en maladies infectieuses ou dans l’institut d’innovation technologique en microbiologie Bioaster, ou encore par les investissements que l’on peut faire aussi à travers Mérieux Equity Partners…
Quelle est l’ambition d’Alexandre Mérieux pour les dix ans qui viennent pour bioMérieux ?
Nous sommes sur des secteurs importants avec des enjeux de santé publique : l’antibiorésistance, les maladies infectieuses… Je ne veux inquiéter personne, mais il y aura de quoi faire dans le futur. Les zoonoses, qui sont les maladies qui viennent de l’animal transmises à l’homme, émergent ou réémergent et le réchauffement climatique ne fait qu’accroître le phénomène. Notre priorité sera toujours de rester en première ligne pour répondre aux enjeux de santé publique, en ayant toujours un bon pipeline d’innovations et de nouvelles solutions technologiques. Après, c’est à moi de continuer le développement de la société en général. On a encore beaucoup à faire dans les pays dits émergents, où il faut que l’on continue à planter le drapeau bioMérieux. Donc je pense qu’on sera bien occupés.
Vous êtes déjà très internationaux, avec 93 % du chiffre d’affaires hors Hexagone. Vous voulez vous développer encore un peu plus dans les pays émergents ?
Quand je regarde la répartition, aujourd’hui les États-Unis sont un super marché d’innovation où la santé est bien prise en compte avec une valeur médicale et économique. Mais après, quand je considère la population mondiale, il y a quand même un regard à avoir vers les pays du Sud et du Sud-Est. C’est quand même là qu’il y a de gros besoins de santé publique et d’innovation, et c’est là qu’il faudra continuer à se développer. À la fois à travers une offre commerciale, mais peut-être pourquoi pas à travers des partenariats et des implantations. C’est un peu le sens de l’histoire.
Sur les acquisitions, le fait que vous soyez désendetté vous offre de belles opportunités ?
Nous avons effectivement une certaine marge de manœuvre et c’est pas mal, vu le contexte, d’être une société désendettée. Nous ne réalisons pas forcément des acquisitions de très grande taille, mais il faut que ce soit stratégique, aussi bien pour l’application clinique et l’application industrielle, et qu’il y ait un avenir. Nous ne nous plaçons pas dans une optique financière, mais en raisonnant avec une stratégie pour 15 ans.
Vous êtes le représentant de la quatrième génération après Marcel Mérieux, Charles Mérieux, Alain Mérieux. Est-ce que ça représente pour vous une pression particulière ?
Absolument pas (rires). J’ai eu peur que vous me parliez de mes enfants ! Ce n’est pas tant de la pression, mais plus une forme de responsabilité. La pression, on l’a tous, et on a la chance d’être plutôt bien entourés à la fois chez bioMérieux et au sein de l’Institut Mérieux. Donc ce que je ressens, c’est l’importance d’avoir le sens des responsabilités.
Comment est-ce que vous définissez vos relations avec votre père ? Est-ce difficile de se faire un prénom, par rapport à tout ce qu’il représente ?
Ouh là, mais je ne vais pas m’allonger (rires). Nous partageons la même vision de ce que doit être une entreprise. Nous avons la chance d’être dans le secteur de la santé, donc encore une fois, ce sont des responsabilités. Nous partageons une vision long terme, nous sommes tous les deux actifs dans nos activités respectives, nous avons une bonne vie de famille. Et il n’y a pas de sujet de pression comme vous dites : il m’a fait confiance, il y a une confiance mutuelle et tout se passe très bien.
Un mot aussi sur l’arrivée l’année dernière d’Exor, la holding des Agnelli, à hauteur de 10 % au capital de l’Institut Mérieux. C’est un atout de plus pour accélérer le développement du groupe dans son ensemble ?
Oui, cela fait un an. Nous nous sommes bien rencontrés et bien trouvés. Eux cherchaient à investir dans le domaine de la santé, et nous en regardant l’environnement et les opportunités qu’il pouvait y avoir aussi bien pour bioMérieux, NutriSciences ou les autres sociétés du groupe, on se disait que c’était pas mal d’avoir à nos côtés un partenaire industriel de long terme s’il y avait besoin de se développer ou de faire des acquisitions. Donc la rencontre s’est organisée dans ce sens-là. Et un an après, ça se passe bien.
Vous êtes vice-président de l’Institut Mérieux, la holding qui chapeaute toutes les entités du groupe. On peut penser qu’un jour, vous serez président de l’Institut Mérieux. Vous sentez-vous prêt aujourd’hui ?
Je ne me suis jamais posé ce genre de questions. Je me projette dans le long terme, mais sans chercher forcément à avoir des étapes et des cartes de visite différentes. Aujourd’hui, en étant très impliqué chez bioMérieux et NutriSciences, c’est déjà une très grosse partie du groupe. L’Institut Mérieux, c’est finalement assez léger. C’est du support, de la gouvernance, c’est trouver des idées, accompagner les femmes et hommes des sociétés, mais ce n’est pas une holding massive et déconnectée. Et il ne faut pas que ce soit le cas. On veut garder une proximité terrain, business et entreprise assez forte.
Lorsque votre père vous demandera d’en prendre la présidence, forcément votre réponse sera positive ?
Je suis déjà bien impliqué dans l’Institut Mérieux (il est vice-président depuis 2008, NDLR) dont bioMérieux est quand même le vaisseau amiral. Donc, même si je ne réfléchis pas comme cela à faire des projections, ma réponse sera positive. Il y a une suite logique, on continuera la suite de l’histoire…
Une histoire assez fabuleuse pour vous, 125 ans maintenant ?
Oui, ce n’est pas mal, je dois le reconnaître (rires). C’est plutôt une belle histoire, mais surtout il y a encore pas mal de choses à faire.

Alain Mérieux : « Alexandre a pris le gouvernail, il barre très bien »
Un voyage aux États-Unis début 1963 avec son père Charles Mérieux pour rencontrer les dirigeants de Becton Dickinson et Alain Mérieux marque les premiers points, car il connaît bien le fameux « fibromètre » dont parlent alors les Américains… Forcément, il a vu cet appareil à la faculté de pharmacie à Lyon. La biologie médicale amorce alors son essor et la plupart des camarades d’Alain Mérieux créent leurs labos d’analyses médicales. Et la joint-venture à 50–50 Becton Dickinson-Mérieux va surfer sur la montée en puissance du diagnostic in vitro. « La société s’est créée en juillet 1963, le jour de mes 25 ans », se remémore Alain Mérieux qui prendra le contrôle de l’entreprise à titre personnel et à 100 % en deux temps, en 1968 puis en 1974. Elle est rebaptisée alors bioMérieux. « Nous avons eu la ténacité de conserver cette entreprise et de la développer à long terme et sur une base planétaire, poursuit Alain Mérieux. Nous avons réalisé de très belles acquisitions. Je ne suis plus aux manettes. Alexandre a pris le gouvernail et il barre très bien ! C’est non seulement une entreprise industrielle, mais aussi une entreprise qui a un rôle sociétal et qui soutient une fondation qui m’est très chère. »
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