Julien Frappa, la recon­ver­sion d’un cita­din

Julien Frappa Julien Frappa © DR

Il y a ceux qui mûrissent des recon­ver­sions profes­sion­nelles pendant de longues années, et puis d’autres, comme Julien Frappa, qui changent de vie presque par hasard, sans avoir fran­che­ment tout plani­fié.

Créa­teur du petit domaine bio L’Oi­seau de Passage installé à Saint-Amour-Belle­vue, dans le nord du Beaujo­lais, le vigne­ron a d’abord navi­gué dans le monde cultu­rel lyon­nais, avec notam­ment un dernier poste, entre 2015 et 2021, dans lequel il était en charge de la produc­tion et de la program­ma­tion scien­ti­fique (confé­rences, tables rondes…) du musée des Confluences.

« Cita­din » auto­pro­clamé, Julien Frappa a alors quitté le centre-ville depuis quelque temps, et s’est installé « à la campagne pour les enfants » dans le Beaujo­lais. « J’ai toujours bien aimé le paysage des vignes, mais je ne connais­sais pas grand-chose en matière de vin. Il m’ar­ri­vait épiso­dique­ment de visi­ter quelques caves, mais c’est vrai­ment en m’ins­tal­lant ici que j’ai décou­vert les diffé­rents crus et commencé mon éduca­tion au vin », retrace-t-il.

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Et comme son métier d’alors l’oc­cupe surtout en soirée et qu’il a du temps libre en jour­née, il décide de faire un stage de vini­fi­ca­tion chez un produc­teur de moulin-à-vent. « Au départ, c’était surtout pour voir, sans idée de recon­ver­sion », raconte-t-il.

Pour­tant tout s’en­chaîne ensuite : la rencontre lors de ce fameux stage d’un novice comme lui, puis la reprise ensemble d’une petite parcelle pour faire quelques bouteilles en paral­lèle de son job au musée des Confluences. « Je me suis d’abord mis à 75 % pour pouvoir conci­lier les deux acti­vi­tés, puis le Covid est arrivé et il n’y a plus eu d’évé­ne­men­tiel au musée pendant plusieurs mois. C’est à ce moment-là que j’ai décidé de pour­suivre mon appren­tis­sage et de me lancer à 100 % dans la produc­tion de vin en repre­nant des parcelles dans le Beaujo­lais et le Mâcon­nais. »

Une produc­tion « plus proche de la nature »

Avec, dès le départ, des idées bien arrê­tées sur sa philo­so­phie de travail : les vignes sont culti­vées en agri­cul­ture biolo­gique – « c’était une évidence de ne pas faire de conven­tion­nel », dit-il –, les sols sont travaillés au cheval et au treuil, des nichoirs et des haies frui­tières sont implan­tés dans les parcel­les… « L’objec­tif est d’être au plus proche de la nature. Les cuvées sont ensuite élabo­rées avec un mini­mum d’in­ter­ven­tions afin de rester fidèle à leur terroir, tout comme les acidi­tés et les degrés alcoo­liques ne sont pas corri­gés pour que les vins laissent s’ex­pri­mer le millé­sime », détaille le vigne­ron de 38 ans.

Il commer­cia­lise, depuis l’an­née dernière, trois petites cuvées (5 000 bouteilles au total) en Beaujo­lais-Leynes, morgon et côte-de-Brouilly sous le nom de L’Oi­seau de Passage en réfé­rence à la chan­son de Bras­sens.

« Je souhaite déve­lop­per une philo­so­phie “haute couture” avec des micro­cu­vées cise­lées, tout en vendant mes bouteilles entre 15 et 20 euros, car c’est ce que j’achète en tant que consom­ma­teur », affirme-t-il, guidé dans cette aven­ture viti­cole par le « plai­sir » et la « liberté totale » : « Le but de cette recon­ver­sion, c’est de m’amu­ser. »

Et cela paie déjà, la produc­tion de Julien Frappa est propo­sée sur quelques belles tables lyon­naises, à l’image de l’étoilé Cour des Loges, du Mercière ou encore du Jean Moulin. Pour la suite, Julien Frappa va ajou­ter un Saint-Amour et un Saint-Véran blanc à sa collec­tion. « Mais je veux rester petit, et conti­nuer ce modèle arti­sa­nal où je fais tout moi-même, jusqu’à coller les étiquettes sur les bouteilles », prévient-il.

Des étiquettes d’ailleurs créées par des artistes graphistes ou des auteurs de BD, un clin d’œil à sa vie d’avant.

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