« Bilans présentés pas sincères», « enrichissement personnel », « faute de gestion », « manœuvres commerciales litigieuses » et même « abus de bien social ». Le jugement du tribunal de commerce d’Aix-en-Provence est cinglant à l’encontre d’Alain Coulas. Connu à Lyon pour être le patron d’ATS Studios (100 collaborateurs, 11,6 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2023) qui se présente comme le numéro 1 français de l’accueil téléphonique, le dirigeant lyonnais est condamné à une interdiction de gérer pendant 15 ans.
Il doit aussi régler un passif de 4 millions d’euros, solidairement avec son ancien associé Jean-François Rouquier – les deux hommes sont aujourd’hui brouillés – qui écope, lui, d’une interdiction de gérer de 10 ans. « Il apparaît au tribunal important de les écarter sans tarder de la vie économique », note sévèrement le jugement rendu début février et dont nous venons de prendre connaissance.
Plusieurs griefs contre Alain Coulas
L’affaire porte sur la faillite d’INPS Groupe, une société spécialisée dans la location de photocopieurs pour les professionnels, installée à Septèmes-les-Vallons en Provence, qui réalisait un peu plus de 10 millions d’euros de chiffre d’affaires par an.
Une entreprise codirigée à partir de 2007 par Alain Coulas et Jean-François Rouquier (qui est également le mari d’une cousine d’Alain Coulas), jusqu’à ce que de sérieux désaccords et des conflits familiaux éclatent entre les deux associés qui se séparent en septembre 2014.
Alain Coulas cède alors l’intégralité de ses titres d’INPS Groupe à Jean-François Rouquier qui restera à la tête de la structure jusqu’à sa liquidation judiciaire prononcée en juin 2018 avec des créances chiffrées à plus de 9 millions d’euros.
« Quand M.Coulas se retire (de l’entreprise en 2014), ses fautes ont posé les bases de la cessation de paiement qui interviendra plus tard », analyse le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence qui pointe plusieurs griefs à Alain Coulas : comptabilité non régulière, usage des biens et crédits d’INPS Groupe à des fins personnelles (en l’occurrence la prise en charge de factures de travaux réalisés dans les locaux d’une autre de ses entreprises), poursuite d’une activité déficitaire, valorisation « artificielle et gonflée de la valeur des titres INPS Groupe » lors de la cession de ses parts à son ex-associé Jean-François Rouquier, sans oublier de souligner le nombre important de litiges avec des clients (102 recensés par le liquidateur) qui se sont regroupés en association des victimes de INPS Groupe.
Alain Coulas reste « droit dans ses baskets »
Contacté par Lyon Décideurs, Alain Coulas déclare être resté « droit dans (s)es baskets » à l’annonce du jugement. « Je ne mets pas un centime dans ma poche s’il n’est pas sur ma fiche de salaire. Cela fait 40 ans que j’agis que la même manière et je ne changerai jamais. Tout ce qui est écrit dans ce jugement est faux et archifaux, cela sera prouvé », affirme-t-il.
Et de poursuivre : « J’ai quitté la société près de quatre années avant l’ouverture de la procédure collective d’INPS Groupe, la déconfiture de cette dernière n’a été causée que par les fautes de mon ancien associé.» En plus de faire appel du jugement (une nouvelle audience est prévue en décembre prochain), Alain Coulas et son conseil ont déposé une assignation avec l’espoir de stopper, fin septembre, l’exécution de l’interdiction de gérer en attendant l’issue de la procédure d’appel.
Son avocat dénonce la « partialité des juges »
« Le jugement du tribunal d’Aix-en-Provence est entaché de nullité et critiquable en tous points. En 20 années d’exercice, je n’ai jamais vu ça. Les juges ont eu la volonté de condamner « coûte que coûte » Alain Coulas, sans aucune considération pour ses arguments », commente de son côté son avocat, Me Jérémy Asta-Vola.
Ce dernier reproche notamment au tribunal d’avoir « clairement et manifestement violé le principe du contradictoire » en retenant contre Alain Coulas des griefs qui n’ont pas été invoqués par le liquidateur judiciaire en charge de la procédure collective d’INPS Groupe.
« Une simple lecture du jugement permet de se convaincre aisément de la partialité des juges. Pour justifier sa condamnation, le tribunal a, de sa propre initiative, reproché à Alain Coulas des faits qui ne constituent pas des fautes de gestion (par exemple le prix de cession des titres à son ancien associé) ou qui ne lui incombaient pas », appuie Me Jérémy Asta-Vola.
Réorganisation à la tête d’ATS Studios
Ce dernier conteste également « les critiques » sur la comptabilité d’INPS Groupe, en s’appuyant sur un rapport rédigé par un expert mandaté par Alain Coulas. « L’expert justifie également que la société INPS Groupe ne souffrait d’aucune insuffisance d’actif à la date de la démission d’Alain Coulas », poursuit Me Jérémy Asta-Vola.
Alain Coulas étant interdit d’exercer tous ses mandats de dirigeant, la présidence d’ATS Studios (qui doit fêter ses 40 ans l’an prochain) est occupée depuis quelques semaines par le consultant et membre du conseil d’administration Philippe Gay, tandis que la DAF, Sylvie Rouault, s’est vue confier la direction générale.
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