Quelles sont les origines et les motivations derrière l’organisation des Assises du Commerce ?
Camille Augey : Le projet est né des bilans de mi-mandat et des échanges qui ont eu lieu dans les différents arrondissements, en présence du maire de Lyon. L’objectif est d’instaurer un véritable dialogue avec les commerçants lyonnais.
➔ À lire aussi : Changement climatique : Bruno Bernard lance une convention métropolitaine
Nous voulons qu’elles soient un moment d’échange, de dialogue et de formulation de propositions concrètes. Ce point est essentiel pour nous, le programme est donc centré autour d’ateliers. Ces ateliers ne sont pas là pour « parler dans le vent », mais pour aboutir à des propositions concrètes émanant des commerçants eux-mêmes, qui seront présentées en fin de journée.
Donc, s’agit-il d’une mission principalement consultative ? Nous avons observé dans d’autres processus participatifs similaires que, souvent, les propositions formulées ne sont pas réellement mises en œuvre. Avez-vous déjà planifié les étapes de suivi après ces assises ?
Je préfère parler de co-construction plutôt que de consultation. Pour moi, une consultation implique souvent d’arriver avec des formulations déjà établies. En revanche, ici, nous venons sans propositions préconçues, car l’objectif des ateliers est bien de les créer ensemble.
Vous avez mentionné les déceptions liées à d’autres expériences : nous ne prétendons pas que 100 % des propositions seront retenues. Une analyse sera effectuée dans les semaines et les mois à venir pour identifier celles qui nous semblent réalisables. Si nous retenons certaines d’entre elles, nous nous engageons à les mettre en œuvre.
Ces assises se concentrent sur le développement des commerçants et artisans indépendants de Lyon. Y a-t-il encore de la place pour eux, notamment dans la Presqu’île lyonnaise ?
Je pense qu’il y a plus que jamais de la place pour les commerçants et artisans indépendants. Ce qui rend un quartier attractif, c’est la richesse et la diversité de son offre commerciale. Bien que l’on parle souvent de l’uniformisation des centres urbains, ce sont précisément les commerçants indépendants qui font la différence.
La Presqu’île a suffisamment d’espace pour accueillir ce type de commerce, avec des niveaux de loyers et des types de locaux variés. La rue de la République dispose de grands locaux, généralement onéreux, qui attirent des grandes enseignes. Ces enseignes jouent un rôle de locomotives, attirant des clients qui irriguent ensuite les autres commerces de la Presqu’île. Cependant, la Presqu’île ne se limite pas à cette rue. De nombreuses autres artères offrent des locaux moins chers et plus petits, permettant ainsi une complémentarité dans l’offre.
Cela dit, il y a des défis liés à l’accès au foncier. C’est d’ailleurs l’un des thèmes des ateliers des assises. La Ville de Lyon soutiendrait une expérimentation d’encadrement des loyers commerciaux, similaire à ce qui a été fait pour les loyers d’habitation. C’est un sujet crucial qui sera discuté lors des assises.
Vous évoquez l’encadrement des loyers commerciaux. Où en êtes-vous dans ce processus ?
Tant que l’État ne donne pas son accord, nous ne pouvons rien mettre en œuvre. Il y a déjà eu un plaidoyer à ce sujet, lors de la période d’Élisabeth Borne, mené par France Urbaine, mais nous avons reçu une fin de non-recevoir à l’époque.
Cela ne signifie pas que le sujet est clos pour autant. Malheureusement, pour le moment, nous ne pouvons rien faire tant que l’État n’ouvre pas la voie. Néanmoins, nous pouvons faire remonter cette demande auprès du gouvernement.
Je pense que nous finirons par y arriver. Bien que nous soyons actuellement dans une période d’incertitude politique qui complique la mise en œuvre de certaines politiques publiques, nous continuerons à défendre cette demande. Je reste optimiste quant à la possibilité que cela se réalise.
Vous parliez également de la rue de la République. Comment voyez-vous l’avenir de cette rue emblématique, qui a malheureusement vu la fermeture de certains commerces et surtout l’apparition de grandes enseignes, qui laissent peu de place aux commerces indépendants ?
La rue de la République est considérée comme la rue commerciale numéro un à Lyon, avec les loyers les plus chers de la ville. Aujourd’hui, elle est quasiment dévolue aux grandes enseignes. Lorsque des commerçants indépendants y sont encore présents, nous nous attachons à les aider à préserver leur place.
➔ À lire aussi : Commerces historiques de la Presqu’île : des fermetures en cascade
Cependant, il faut être réaliste : ce n’est pas dans la rue de la République que l’on retrouvera de nombreux commerçants indépendants. La typologie des locaux ne s’y prête pas forcément. Cela dit, la presqu’île est suffisamment vaste pour accueillir des commerçants indépendants dans d’autres secteurs. L’attractivité de la presqu’île repose justement sur la complémentarité de toutes ces offres.
Et aussi la vente en ligne, qui sera un sujet abordé durant les assises. Est-ce la solution pour les petits commerçants de survivre face aux grandes marques ?
Effectivement, aujourd’hui, cela fait partie des éléments structurants. Ma conviction est qu’il est important que les commerçants soient digitalisés, au moins en ayant une présence en ligne, comme une référence Google ou un canal sur les réseaux sociaux. En effet, les clients, même s’ils n’achètent pas en ligne, préparent souvent leurs achats sur Internet. Ils regardent d’abord en ligne avant d’acheter. Avoir une présence en ligne est aujourd’hui indispensable.
Cependant, ce qui fera la différence avec la vente en ligne et la concurrence des pure players, c’est l’expérience client. Cela inclut une offre de produits bien différenciée, mais aussi l’expérience client qui incitera les consommateurs à se déplacer plutôt qu’à opter pour la facilité d’un clic depuis chez eux pour commander le produit souhaité. C’est également l’objet d’un atelier lors de ces assises.
Un autre sujet qui suscite beaucoup de discussions est la Zone à Trafic Limité, qui peut engendrer des inquiétudes pour les commerçants du centre-ville. Cependant, ce thème ne figure pas dans le programme de ces assises.
Tout à fait, car il ne s’agit pas d’une instance de concertation spécifique à la Presqu’île. Nous nous adressons à tous les commerçants de Lyon. Il existe d’autres instances dédiées à la Presqu’île, comme un comité de suivi regroupant l’ensemble des acteurs commerciaux, mais aussi d’autres parties prenantes. Ces instances permettent des moments de dialogue, de concertation, et de co-construction.
L’objectif de ces assises n’est de discuter des solutions applicables à l’ensemble de la ville, où tous les commerçants sont les bienvenus. Certes, nous n’aborderons pas spécifiquement la question de la Zone à Trafic Limité, mais un atelier traitera de l’espace public de manière générale, incluant les conflits d’usage et des problématiques du quotidien, telles que l’accessibilité, sans se focaliser sur un quartier particulier.
Merci d’avoir lu cet article ! Si vous avez un peu de temps, nous aimerions avoir votre avis pour nous améliorer. Pour ce faire, vous pouvez répondre anonymement à ce questionnaire ou nous envoyer un émail à [email protected]. Merci beaucoup !