L’objectif est clairement défini : doubler le transport fluvial sur le Rhône d’ici 2032. Le géant maritime CMA CGM accoste au port de Lyon Édouard-Herriot après avoir obtenu la sous-concession du terminal à conteneurs pour les 30 prochaines années.
Aux côtés du groupe marseillais, la Banque des Territoires (actionnaire à hauteur de 23 %), la CCI Lyon-Métropole (4 %) et la CCI Aix-Marseille-Provence (4 %) complètent un groupement qui annonce l’investissement de 40 millions d’euros pour augmenter la capacité et moderniser les infrastructures, et ainsi donner un coup de fouet au pôle logistique qui s’étend sur plus de 180 hectares à Gerland.
« Ce projet reflète notre ambition, aux côtés de nos partenaires, de moderniser et de renforcer le rôle stratégique du port de Lyon Édouard-Herriot, grâce à des solutions logistiques durables et en développant le report modal principalement au départ du port de Marseille Fos », précise Emmanuel Delachambre, vice-président en charge des terminaux au sein de Groupe CMA CGM qui compte 20 000 collaborateurs dans le monde.
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Le port Lyon Édouard-Herriot est la seule infrastructure de la vallée du Rhône disposant de terminaux permettant à la fois la manutention de conteneurs et de colis lourds. Avec 1,9 million de tonnes de marchandises (produits énergétiques et métallurgiques, matériaux du BTP, produits et cultures agricoles, bois, etc.) et 53 000 conteneurs traités en 2023, le nouveau groupement s’engage à acheminer 100 000 conteneurs fluviaux par an dans les années à venir.
Construit à la fin des années 1930, il s’agit d’un « poumon économique et d’une structure stratégique à Lyon », avance Thomas San Marco, le directeur exécutif de la Compagnie nationale du Rhône. CNR, aménageur du Rhône, exploite 17 zones d’activité portuaires le long du fleuve, dont le port de Lyon, jusqu’à présent géré par Lyon Terminal, une de ses filiales. « Nous avons décidé de passer la main du terminal à un acteur qui a réellement la capacité de développer les flux qui passeront », poursuit-il.
Un impact attendu pour la région
Le développement du fret sur le Rhône devrait représenter un levier pour les acteurs locaux : « La présence des CCI dans le groupement est très intéressante, car elles ont la capacité de mobiliser les entreprises. Avec ce mouvement, nous nous donnons les moyens de renforcer la dynamique sociale du port de Lyon », souligne le directeur exécutif de CNR.

Parmi les modifications prévues pour le terminal à conteneurs, le groupement annonce non seulement la modernisation des infrastructures existantes, mais aussi une extension de 2,9 hectares ainsi que la création de nouvelles voies ferrées connectant le port à l’intérieur du territoire.
Une excellente nouvelle pour la région, selon le président de la CCI Lyon Métropole Saint-Étienne Roanne : « Le transport fluvial est aujourd’hui sous-utilisé dans la région. On attend plus de flux donc forcément, l’économie en bénéficie. L’impact stratégique pour la région est énorme », déclare Philippe Valentin, président de la CCI.
« Le transport fluvial est aujourd’hui sous-utilisé dans la région. L’impact stratégique pour la région est énorme »
Le pari dans le fluvial suppose, cependant, un changement de paradigme. Sur l’axe MeRS (Méditerranée Rhône-Saône), seulement 5 % des marchandises sont actuellement acheminées par le Rhône, contre 80 % par la route bien plus rapide.
Selon Philippe Valentin « On densifie un port méconnu sur le territoire. Il y a un travail à faire avec les partenaires en termes d’information, de sensibilisation et de formation pour utiliser ce mode de transport plutôt que d’autres. Les entreprises doivent se réapproprier le fleuve. » Des efforts qui bénéficieront, d’après lui, de la force de frappe du troisième acteur mondial du transport maritime, desservant plus de 400 ports dans le monde : « Avoir CMA CGM, cela permet de disposer d’un savoir-faire financier et technique. On a le bon partenaire. »
C’est un avis partagé par Thomas San Marco, qui estime que le rôle des nouveaux acteurs du port sera désormais de promouvoir l’attractivité d’un mode de transport « vert, fiable et économique », tout en évitant une opposition frontale avec le transport routier : « Il faut être complémentaires pour décongestionner et décarboner. »
En route vers le Grand Port Lyon-Marseille
Le choix d’un groupe marseillais pour développer le fret lyonnais n’est pas le fruit du hasard. « Bien sûr, en attribuant cette sous-concession à un opérateur comme CMA CGM, déjà implanté dans les terminaux marseillais, nous nous inscrivons dans la dynamique d’optimisation des relations entre Marseille et Lyon », reconnaît-on chez CNR.
Cette sous-concession s’insère dans le cadre du projet du Grand Port Lyon Marseille, lancé par Emmanuel Macron. « Il y a deux ans, le président s’était rendu à Marseille, j’y étais aussi, pour dire que cela nous intéressait. Deux ans plus tard, les deux CCI concernées sont associées à la sous-concession du terminal à conteneurs du port de Lyon. Nous sommes donc en plein dans la demande… Quand les bonnes énergies sont réunies, on se rend compte qu’on avance bien plus vite qu’on ne l’imaginait », se réjouit Philippe Valentin.
Perçu par le président de la CCI comme un projet stratégique pour renforcer l’attractivité des deux villes, ce corridor fluvial vise à faire du territoire lyonnais une « clé de jonction » entre le Sud et le Nord de l’Europe.
Loin encore d’un « changement de paradigme », le transport fluvial commence toutefois à se faire une place. « Depuis quelques années, l’État s’est mobilisé pour le développement du transport fluvial », estime Thomas San Marco.
Une dynamique soutenue notamment par des directives européennes tel le Green Deal, qui le promeut comme un levier clé pour la décarbonation du secteur des transports. « Il faut une coopération efficace entre tous les modes de transport. On ne peut pas parler d’une France à +4 degrés et ne pas se donner les moyens d’optimiser nos logistiques. Mais justement, à Lyon, nous faisons un pas en avant », conclut le directeur exécutif de CNR.
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