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C’est un « fait divers » qui restera à jamais dans sa mémoire. Le promoteur immobilier, qui a commencé dans une régie d’immeubles à Lyon, s’apprête alors à passer d’une entreprise classique à un projet associatif baptisé Habitat & Humanisme. Dans le cadre d’une opération de démolition d’un vieil immeuble, frappé d’un arrêté de péril, dans le 6e arrondissement, il a relogé une femme âgée, sans enfant, qui tente de mettre fin à ses jours.
Arrivant à l’hôpital, il obtient de pouvoir la rencontrer. « Vous ne voulez pas voir que ma vie, c’est ce quartier, lui explique-t-elle. J’ai tout perdu. Vous avez le pouvoir de déplacer les gens. Ma vie n’a plus de sens. » Pour Bernard Devert, cette rencontre a été déterminante. « L’histoire d’Habitat & Humanisme repose sur une multitude de rencontres comme celle-là, explique-t-il. La mixité sociale, le refus de regrouper les personnes en difficulté dans des ghettos sont des marqueurs forts. »
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Depuis bientôt 40 ans, Habitat & Humanisme s’efforce de trouver des solutions de logement pour les plus fragiles. Collectrice de l’épargne de ses donateurs, l’association propose une rémunération solidaire des placements : le souscripteur abandonne une partie du taux d’intérêt de son placement. Tout cela organisé par l’intermédiaire de foncières : une pour la partie logement, une autre pour les « résidences de vie et de soins » qui accueillent 4 000 personnes.
Bernard Devert entend dépasser le strict cadre de l’Ehpad. « Tout ce que nous entreprenons est possible grâce à l’économie solidaire. Elle représente 1 % de l’actif circulant des Français. Si on passait à 5 %, on pourrait faire bien plus », explique le fondateur d’Habitat & Humanisme. En presque quatre décennies, ce sont plus de 10 000 logements que l’association a pu proposer sur tout le territoire français. Car si l’aventure a commencé à Lyon, elle a largement essaimé avec environ 65 fédérations départementales.
« J’ai cru à cette utopie »
Outre l’argent collecté, Habitat & Humanisme reçoit aussi des dons, des legs, des immeubles ou des maisons à rénover pour loger ensuite des familles dans le besoin. Avec toujours la volonté de promouvoir le logement social partout dans les villes, y compris dans les quartiers favorisés. Ce qui obligera parfois Bernard Devert à devoir ferrailler dur avec certaines collectivités locales qui ne voient pas d’un bon œil l’arrivée de démunis chez elles.
Depuis quelque temps, il s’active aussi sur le dossier de la vacance de logements dans les villes, multipliant les interventions et sollicitations d’élus et de responsables politiques et économiques. Et c’est à Lyon qu’il aimerait pouvoir avancer sur ce dossier avant de travailler dans toutes les villes concernées.
« La dimension du fragile s’avère une force. Elle ouvre les cœurs. Il y a tant de gens en situation de nécessité. L’humanisme, c’est l’attention aux fragiles. Lyon est la capitale de l’humanisme et de la résistance. Autrement dit : ne pas lâcher prise. Cette ville a le sens des compromis. Ce n’est pas celle des chapelles. Au contraire, on cherche à créer des cathédrales. C’est le savoir-faire ensemble, cette façon d’être ensemble. C’est ainsi qu’on a mis Habitat & Humanisme en mouvement », conclut Bernard Devert. Et de se souvenir d’une remarque d’Alain Mérieux : « C’est une utopie votre histoire. Finalement, j’ai cru à cette utopie. »
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